Google aurait détruit l'expérience de recherche en raison de sa quête effrénée de profits
Les personnes qui s'intéressaient à cette affaire ont été toutes déçues par le caractère à huis clos du procès. Les rares informations qui font l'objet de fuite l'ont été par les personnes s'étant déplacées vers le tribunal ou les témoins autorisés à s'exprimer. Lundi, un journaliste de Wired ayant eu accès à la salle d'audience a rapporté que certains documents présentés dans le cadre du procès pourraient prouver que Google les requêtes de recherche dans le but d'augmenter ses profits sur les publicités. Une diapositive interne de Google présenté lundi porterait sur une révision de l'algorithme des SERP (page de résultats d'un moteur de recherche).
Lorsqu'un internaute saisit une requête, il peut s'attendre à ce qu'un moteur de recherche intègre des synonymes dans l'algorithme ainsi que des paires d'expressions textuelles dans le traitement du langage naturel. Mais cette refonte serait allée plus loin, en modifiant les requêtes pour générer des résultats plus commerciaux. Les chercheurs soupçonnent depuis longtemps Google de manipuler les prix des publicités, et le rapport note qu'il est désormais clair que le géant de Redmond traite les consommateurs avec le même dédain. Ce que l'entreprise appelle "résultats organiques" ne serait rien d'autre qu'un autre vecteur de la cupidité de Google.
« Les dix liens bleus (ou résultats organiques) que Google présente comme étant sacrosaints ne sont qu'un autre vecteur de la cupidité de Google », indique le rapport qui suggère que Google manipule probablement les requêtes des milliards de fois par jour dans des milliards de variations différentes. Mais comment cette manipulation fonctionne-t-elle ? Le rapport prend l'exemple d'un l'utilisateur qui lance la recherche suivante : « vêtements pour enfants ». Selon le rapport, à l'insu de l'utilisateur, Google pourrait convertir sa requête en une phrase comportant des mots clés comme ce qui suit : « vêtements pour enfants de la marque NIKOLAI ».
Google remplace ainsi en coulisse sa requête réelle par une requête différente qui génère justement plus d'argent pour l'entreprise, et qui produira des résultats qu'il ne recherche pas du tout. Il n'est pas possible de refuser la substitution. Si l'utilisateur n'obtient pas les résultats souhaités et qu'il essaie d'affiner sa requête, cela ne fonctionne pas. « Il s'agit d'un centre commercial tordu dont vous ne pouvez pas vous échapper », indique le rapport. Les résultats générés pour cette requête sont plus susceptibles d'inciter l'utilisateur à cliquer sur des annonces pour faire du shopping, à l'instar du présentoir de bonbons à la caisse d'un magasin d'alimentation.
En outre, cette requête génère également les annonces de mots clés placées sur la page de résultats du moteur de recherche par des magasins qui paient Google chaque fois que vous cliquez sur ces annonces. « C'est un moyen garanti de remplir les poches de Google. C'est aussi un moyen garanti de nuire à tout le monde, sauf à Google. Cela réduit la qualité du moteur de recherche pour les utilisateurs et augmente les dépenses des annonceurs. Google peut s'en tirer parce que ces manipulations sont imperceptibles pour l'utilisateur et l'annonceur, et que l'entreprise a réussi à s'emparer de plus de 90 % des parts de marché », indique le rapport.
Selon certains analystes, les révélations faites depuis le début du procès pourraient nuire profondément à la réputation de Google des consommateurs. Le procès tend à révéler non seulement comment l'entreprise les manipule pour tirer le plus possible de profits de leurs expériences de recherche, mais également comment elle infiltre leur vie privée sous des prétextes fallacieux. En outre, ils estiment que ce procès historique pourrait rebattre les cartes sur le marché de la recherche en ligne.
Microsoft accuse Google de pratiques déloyales sur le marché des moteurs de recherche
Le procès historique des États-Unis contre Google s'est ouvert le 12 septembre dernier. Il rappelle celui qui a secoué son rival Microsoft au début du millénaire, où l'éditeur de logiciels de Redmond a été frappé par de lourdes sanctions réglementaires. Dans le cas de Google, le DOJ et la Federal Trade Commission (FTC) des États-Unis allèguent que l'entreprise a abusé de la position dominante de son moteur de recherche omniprésent pour freiner la concurrence et l'innovation au détriment des consommateurs. L'affaire était censée être très médiatisée comme on a pu le voir il y a un peu plus de 20 ans dans le cas du procès antitrust contre Microsoft.
Cependant, la majorité des auditions dans le cadre du procès contre Google a lieu à huis clos. Google avait auparavant plaidé en faveur d'un voile de secret, ce qui est probablement la raison pour laquelle les médias n'ont pas été autorisés à tenir un blogue en direct de l'audience. Et les pièces à conviction utilisées dans la plaidoirie du DOJ (courriels, mémos/présentations internes de Google, etc.) ne sont plus accessibles. Ces documents ont été publiés et accessibles pendant un temps sur le site Web de l’administration, mais ont été retirés vers la fin du mois de septembre. Google craint que des chiffres confidentiels et des secrets d’entreprise soient révélés.
Le témoignage du PDG de Microsoft, Satya Nadella, a été rapporté par des journalistes présents sur les lieux. Lors de son audition, Nadella a déclaré que les tactiques déloyales utilisées par Google ont conduit à sa domination en tant que moteur de recherche. Il a déclaré que la domination de Google était due à des accords qui en faisaient le navigateur par défaut sur les smartphones et les ordinateurs. Nadella a également réfuté l'idée selon laquelle l'IA, les moteurs de recherche plus spécialisés (comme celui proposé par Amazon) ou les sites de médias sociaux ont changé de manière significative le marché sur lequel Microsoft est en concurrence avec Google.
Google estime en fait que les outils d'IA tels que le chatbot ChatGPT ont accru la concurrence sur le marché des moteurs de recherche. Selon Nadella, Microsoft a dépensé environ 100 milliards de dollars pour construire et développer son moteur de recherche Bing. Il a indiqué que Bing restera sur le marché malgré les difficultés rencontrées par l'entreprise. « Je considère la recherche ou la recherche sur Internet comme la plus grande catégorie de logiciels. Notre part de marché est très, très faible. Mais nous continuons à nous y intéresser parce que nous pensons qu'il s'agit d'une catégorie de logiciels à laquelle nous pouvons contribuer », a déclaré Nadella.
Il a précisé son point de vue en indiquant qu'il avait demandé à Google d'ajouter une fonction permettant de transférer des campagnes publicitaires de Google à Bing, mais qu'il n'avait reçu aucune réponse de la part de l'entreprise. « Nous ne cessons de leur demander d'ajouter des fonctionnalités que nous souhaitons. Ils nous ont demandé d'aller voir ailleurs », a-t-il déclaré. Il a aussi évoqué la nouvelle selon laquelle Google aurait payé Apple pour être le moteur de recherche par défaut sur les appareils de la marque à la pomme. En outre, Nadella a ajouté qu'Apple utilisait Microsoft Bing pour augmenter le prix qu'elle tirait de son contrat avec Google.
Enfin, Satya Nadella aurait également évoqué les préférences des utilisateurs en matière de services. Il aurait fait remarquer qu'il est plus facile de changer un moteur de recherche sur un ordinateur de bureau, mais que Google a compliqué les choses sur les téléphones portables. « Aujourd'hui, la modification des paramètres par défaut est plus facile sur Windows et plus difficile sur les téléphones portables », a-t-il déclaré. Selon le témoignage de Jonathan Tinter, un cadre de Microsoft, l'entreprise a dû céder à cette exigence et faire de Google le moteur de recherche par défaut sur son smartphone Surface Duo afin de recevoir la licence Android de Google.
Il faut noter que les utilisateurs ont été confrontés à un problème similaire avec la sortie de Windows 11, où le changement du navigateur par défaut était un parcours de combattant. L'entreprise forçait également l'ouverture des liens des applications par le biais de son navigateur Edge, ce qui a attisé l'ire des administrateurs système. Toutefois, Microsoft a récemment annoncé l'arrivée de changements visant à faciliter les choses pour les utilisateurs, probablement dans le but de se conformer aux nouvelles règles européennes sur les services numériques (DSA - Digital Services Act). L'entreprise respectera le choix du navigateur par défaut des utilisateurs de l'UE.
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Que pensez-vous des déclarations du PDG de Microsoft au sujet de la domination de Google ?
Selon vous, le moteur de recherche Bing est-il de taille à concurrencer Google ? Pourquoi ?
Que pensez-vous de la manipulation présumée des requêtes de recherche par Google ?
Quel est votre appréciation de l'expérience de recherche avec Google sur ces dernières années ?
Quels impacts ce procès pourrait-il avoir sur le marché des moteurs de recherche ?
Quels seraient les impacts sur Google si l'entreprise venait à perdre le procès ?
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