Malgré l'application en France de la nouvelle réforme européenne du droit d'auteur censée faire obligation aux plateformes en ligne et autres agrégateurs de rémunérer la reprise des contenus des éditeurs et agences de presse, Google ne payera pas ces derniers pour l’affichage d’extraits de leurs articles, photos et vidéos en Hexagone. Mais la plateforme ne reprendra plus ces contenus sans leur accord, a annoncé ce mercredi un responsable de l’entreprise. Cette décision n’a pas eu l’assentiment du gouvernement, qui a jugé la position du géant de l’Internet inadmissible et promis de chercher une solution avec ses homologues européens.
La joie des éditeurs de presses a été de courte durée. Google a douché ce mercredi leurs espoirs de toucher des revenus de la part du moteur de recherche pour la reprise de leurs contenus, sous forme de courts extraits dans les résultats de recherche. Le géant américain du numérique a annoncé de nouvelles règles qui s'appliqueront le mois prochain en France, en application de la nouvelle directive du droit d’auteur en France. La France est le premier pays membre de l'UE à appliquer cette directive, adoptée fin mars.
En effet, cette loi instaure notamment un « droit voisin » au profit des éditeurs de presse et agences de presse. Cette mesure est censée les aider à se faire rémunérer pour la reprise de leurs contenus par les plateformes en ligne et autres agrégateurs, en compensant ainsi l'effondrement de leurs recettes publicitaires traditionnelles au profit des géants de l’Internet, comme Facebook et Google.
Cette directive avait fait l'objet d'une intense bataille de lobbying à Bruxelles, avec une mobilisation sans précédent des GAFA, qui avaient notamment argué qu'elle réduirait la liberté d'expression sur Internet. En effet, selon la loi, la reproduction de plus que de « simples mots ou de très courts extraits » de reportages nécessite une licence. Cela couvre probablement bon nombre des extraits couramment affichés aux côtés des liens afin de donner aux lecteurs une idée de ce à quoi ils aboutissent.
Et tous les services d’agrégations de nouvelles sont concernés par la loi, y compris les services fournis par des grandes plateformes en ligne, des particuliers, des petites entreprises ou des organisations à but non lucratif, ce qui inclut probablement des blogs ou des sites Web monétisés. Ces derniers devront acheter de manière préventive ces licences auprès des éditeurs de presse.
Une myriade de politiciens et d'entreprises de l'UE avaient exprimé leurs préoccupations concernant certaines parties de la réforme, y compris de grands acteurs de l’Internet comme Google. En février, Google avait présenté son opposition à la loi et appelé à un correctif avant qu’il ne soit trop tard. Google avait mis principalement en garde contre les articles 11 et 13, qui selon lui pourraient avoir des effets catastrophiques sur l'économie créative en Europe en empêchant les téléchargements des utilisateurs et le partage d’actualités.
Concernant l’article 11 de la loi, Kent Walker, premier vice-président des affaires mondiales chez Google avait déclaré : « Nous réitérons notre engagement à soutenir un journalisme de haute qualité. Cependant, le débat récent montre qu’il existe une incompréhension fondamentale de la valeur des titres et des extraits, ces très brefs aperçus de ce que quelqu'un trouvera lorsqu'il clique sur un lien. Réduire la longueur des extraits à quelques mots ou extraits courts compliquera la tâche des consommateurs en matière de découverte de contenu d'actualité et réduira le trafic global des éditeurs d'actualités ».
Les nouvelles règles de Google pour la France qui dérangent le gouvernement
En application de la réforme européenne du droit d’auteur, Richard Gingras, vice-président de Google en charge de l'information, a présenté mercredi les nouvelles règles de l’entreprise à la presse. À partir du mois prochain, les éditeurs de presse basés en Europe devront désormais décider individuellement si, en France, des extraits de leurs infos (textes, vidéos...), ou "snippets", et autres images miniatures (ou "thumbnails" continueront d'apparaître à côté des liens renvoyant vers leurs sites. Ceci est valable tant pour les résultats de recherche que pour Google Actualités.
Les éditeurs qui accepteront, ces extraits s'afficheront sans qu'ils soient rémunérés par Google. Dans ce cas, ils pourront notifier à Google qu'ils souhaitent continuer d'afficher des extraits de texte, en spécifiant même le nombre de caractères autorisés, et des images miniatures. Ils pourront aussi définir pour quels contenus ils autorisent Google à fournir ainsi plus d'information à l'internaute – au risque qu'il ne s'estime suffisamment informé et ne clique pas sur le lien – privant ainsi le média de revenus publicitaires ou d'opportunités d'abonnement.
Pour les éditeurs de presse qui ne le souhaiteront pas, ne verront plus désormais les extraits de leurs articles et autres mini-images s'afficher dans les résultats du moteur de recherche, qui n'incluront dans ce cas qu'un titre et un lien vers les informations des éditeurs concernés. Mais le leader de la publicité en ligne a assuré que les actualités de ces médias continueront bien à être référencées, même si ces éditeurs de presse risquent de voir le trafic vers leurs sites diminuer voire chuter. Google avait prévenu en février dernier que les sites d'informations risquent de perdre 45 % de leur trafic si l'UE ratifiait sa réforme du droit d'auteur.
Le géant américain du numérique a également assuré que ses nouvelles règles sont dans l'intérêt des internautes, empêchant que les résultats de recherche soient faussés par des considérations commerciales. « Nous n'avons jamais payé pour inclure des résultats dans les recherches et nous ne payons pas pour inclure des liens dans les résultats », car « cela saperait la confiance de nos utilisateurs », a assuré Richard Gingras.
Cependant, Franck Riester, le ministre français de la Culture, a jugé ces nouvelles règles de Google « inacceptables », et va chercher une solution avec ses homologues européens. L'instauration d'un droit voisin doit « permettre un juste partage de la valeur produite, au bénéfice des plateformes, par les contenus de presse. (...) La proposition de Google n’est évidemment pas acceptable », a déclaré le ministre dans un communiqué.
Google n'a pas brandi la menace d'une fermeture totale de Google Actualités (la version française de Google News), mais la décision de ne pas rémunérer l’affichage des extraits de contenus passe difficilement chez les éditeurs, qui voient ainsi se réduire les espoirs de retombées liées au droit voisin. Toutefois, Google continuera d’apporter du trafic à leurs sites.
Source : Google
Et vous ?
Quels commentaires faites-vous des nouvelles règles de Google ?
Que pensez-vous de la réaction du ministre de la Culture ?
Pensez-vous que les autres géants du numérique rejoindront Google sur sa proposition ?
Lire aussi
Google prévient que les sites d'informations risquent de perdre 45% de leur trafic, si l'UE ratifie sa réforme du droit d'auteur
YouTube et ses utilisateurs sont menacés par la nouvelle directive de l'UE sur le droit d'auteur. Quels impacts pour les utilisateurs européens ?
Le Parlement européen dit oui à la directive sur le droit d'auteur, un jour sombre pour les libertés numériques, selon une eurodéputée
Directive du droit d'auteur : la Pologne a déposé une plainte devant le plus haut tribunal de l'UE, pour demander une modification de la réglementation au nom de la liberté d'expression
Copyright : l'UE sur le point de finaliser une machine de censure et sa taxe sur les liens Internet, que contiennent ses dernières propositions ?
Google ne paiera pas les éditeurs de presse en France pour l'affichage des extraits de leurs contenus,
Mais il ne les fera plus apparaître dans ses résultats sans leur accord
Google ne paiera pas les éditeurs de presse en France pour l'affichage des extraits de leurs contenus,
Mais il ne les fera plus apparaître dans ses résultats sans leur accord
Le , par Stan Adkens
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !