Que ne feront pas les vendeurs, inscrits sur des plateformes d’envergure mondiale et associées à une concurrence féroce comme le site Web d’Amazon, pour que leurs produits se retrouvent parmi les meilleurs produits dans leur catégorie ? Pour y parvenir, les vendeurs d’Amazon offrent aux acheteurs des pots-de-vin en espèces ou des chèques-cadeaux en échange des critiques positives afin de cumuler des meilleurs avis sur leurs articles, a révélé une nouvelle enquête de Which ?, un organisme de surveillance des consommateurs basé au Royaume-Uni. Le magazine Newsweek rapporte également que l’enquête a permis de savoir que les vendeurs trompeurs utilisent d’autres tactiques, y compris le piratage, pour contourner les systèmes de sécurité d'Amazon et publier de fausses critiques de produits.
Lors de son enquête, Which ? a analysé des milliers d'annonces et examiné les 20 meilleurs produits dans les catégories de technologie domestique les plus populaires. Cette étude lui a permis de trouver de multiples tactiques abusives des vendeurs et de découvrir jusqu'où ces fournisseurs du géant mondial du commerce électronique vont pour induire les clients en erreur en les trompant sur la valeur réelle de leurs produits.
Les chercheurs de Which ? ont également examiné près de 90 plaintes d'utilisateurs au sujet de fausses critiques au cours des dernières semaines, y compris des commentaires positifs sur les produits postés par les utilisateurs en échange de pots-de-vin en espèces et des bons-cadeaux offerts par des vendeurs, mais aussi des fausses opinions affichées par des comptes Amazon piratés. L'enquête a révélé qu’effectivement que certains vendeurs piratent des comptes utilisateur Amazon authentiques pour publier de fausses critiques, selon Newsweek.
Natalie Hitchins, responsable des produits et services à domicile du groupe, a déclaré : « Notre enquête montre jusqu'où des vendeurs sans scrupules peuvent aller pour tromper constamment les acheteurs ». « Il est inacceptable que les consommateurs continuent d'être induits en erreur en achetant des produits de mauvaise qualité ou même dangereux par le système actuel d'évaluations et de classements », a poursuivi M. Hitchins. Elle a également souligné que les coupables pourraient avoir des problèmes juridiques avant de suggérer que « Les plateformes en ligne doivent faire plus pour s'attaquer aux fausses critiques, en allant au-delà de l'approche actuelle ».
Dans un premier cas découvert, les enquêteurs ont indiqué qu'un client avait reçu huit demandes de la part d'un vendeur pour faire passer une cote de 3 étoiles à 5 étoiles sur un projecteur solaire, en échange d’un remboursement partiel du prix payé pour l’appareil. Dans un second cas, Which ? a trouvé qu’un client, qui s'est plaint dans un commentaire à propos d’un produit qui ne fonctionnait pas comme annoncé, avait reçu une carte-cadeau Amazon de 25 livres sterling en échange de la suppression de ses critiques. Dans un troisième cas découvert par Which ?, un client a déclaré que son compte avait été compromis et utilisé par un tiers pour laisser 2 552 commentaires sur plusieurs produits. Selon Which ?, certaines victimes de piratage avaient été informées qu'elles devraient retirer manuellement les critiques frauduleuses.
Au cours de l'enquête, les chercheurs de Which ? ont également trouvé d’autres vendeurs profitant de la fonction de « fusion de produits » d'Amazon, qui est utilisée pour regrouper les commentaires d'articles similaires en un seul endroit. Cette fonction est censée faciliter la recherche de contenu pertinent pour les clients, mais les chercheurs ont trouvé que certains fournisseurs l’utilisaient pour fusionner des anciens produits ou produits indisponibles avec de nouvelles listes de produits afin de transférer les commentaires positifs entre les articles.
A titre d’exemple, les chercheurs de Which ? ont trouvé une montre intelligente avec 938 critiques remontant à 2011, alors que le produit n'est sorti qu'en janvier 2019. Dans un autre exemple, les commentaires d'une paire d'écouteurs avaient été renforcés par des critiques positives destinées à un distributeur de savon et à une housse d'écran de téléphone. Le géant du commerce de détail en ligne a dit dans une déclaration :
« Même une critique inauthentique est une critique de trop. Nous avons des lignes directrices claires... pour les évaluateurs et les partenaires de vente et nous suspendons, interdisons et intentons des poursuites judiciaires contre ceux qui violent nos politiques ». « Nous estimons que plus de 90 % des évaluations non authentiques sont générées par ordinateur, et nous utilisons la technologie de l'apprentissage automatique pour analyser toutes les évaluations entrantes et existantes 24h/24 et 7j/7 et bloquer ou supprimer les évaluations non authentiques », a-t-il ajouté.
Dans une précédente investigation, un an avant les nouvelles technologies de suppression des fausses évaluations d’Amazon, Which ? a découvert des groupes Facebook « usine de critiques » qui revendiquent de milliers de membres publiant de fausses critiques. Mais bien que l’organisme ait signalé le problème à Facebook, il affirme avoir trouvé des groupes de critique « très actifs », dont un a publié 133 fois en une heure.
Face à cette persistance des vendeurs peu recommandables, Hitchins a déclaré qu'à moins que les plateformes en ligne ne fassent davantage pour lutter contre ces fausses critiques, l'Autorité de la concurrence et des marchés (CMA) doit intervenir « pour faire en sorte que les fausses critiques et autres tactiques trompeuses puissent être éliminées ».
Les fausses critiques sur la plateforme d’Amazon ne datent pas de maintenant
Les fausses critiques sont un problème pour Amazon depuis sa création, mais le problème semble s’être intensifié en 2015, lorsque la plateforme de e-commerce fondée par Jeff Bezos a commencé à courtiser les vendeurs chinois, selon un article de The Hustle publié en avril dernier. Cette décision a entraîné un afflux important de nouveaux produits et de nouveaux concurrents basés notamment à Guangzhou et à Shenzhen, en Chine. Une étude publiée par The Hustle a récemment révélé que cette situation a incité de nombreux marchands à abuser du système mis en place sur Amazon pour attirer l’attention des consommateurs et vendre plus rapidement leurs produits.
« Il est beaucoup plus difficile de vendre sur Amazon qu’il y a deux ou trois ans », a confié à ce propos Fahim Naim, un ancien responsable d’Amazon qui est actuellement à la tête d’une société de conseil en e-commerce, précisant que « de nombreux vendeurs essaient de trouver des raccourcis ». Steve Lee, un marchand basé à Los Angeles et inscrit sur Amazon, estime pour sa part qu’il est impossible de faire autrement pour s’en sortir : « tu dois jouer le jeu pour vendre maintenant », « ce jeu, c’est tricher et enfreindre la loi ».
Une étude récente menée par ReviewMeta, un site Web spécialisé dans la détection de fausses critiques, a signalé qu’en mars 2019 seulement, Amazon a enregistré plus de 2 millions d’avis non vérifiés — des critiques qui ne peuvent être confirmées comme des achats effectués sur le site. Selon l’étude, 99,6 % de ces avis non vérifiés étaient marqués cinq étoiles et presque tous destinés à des produits électroniques bon marché et sans marque : chargeurs de smartphones, casques d’écoute, câbles. L’étude est arrivée à la conclusion que les fraudeurs achètent des milliers de faux commentaires Amazon notés 5 étoiles via Facebook.
Selon le magazine Newsweek, l'CMA a exhorté Facebook le mois dernier à donner suite à la vente de fausses critiques sur sa plateforme. Le géant des médias sociaux a par la suite déclaré que les groupes signalés avaient été retirés. Voici ce qu’un porte-parole de Facebook a répondu :
« Les activités frauduleuses sont interdites sur Facebook, y compris l'échange de fausses critiques, et nous avons supprimé tous les groupes que Which ? nous a signalés ». « Nous savons qu'il y a encore beaucoup à faire pour régler ce problème, c'est pourquoi nous avons triplé la taille de notre équipe de sécurité et de sûreté, qui est passée à 30 000 personnes, et nous continuons d'investir dans la technologie pour aider à prévenir ce genre d'abus de manière proactive », a-t-il ajouté.
Amazon a également déclaré : « Notre équipe enquête sur les révisions suspectes, travaille avec les sites de médias sociaux pour arrêter les critiques non authentiques à la source, intente des poursuites judiciaires pour empêcher les contrevenants de planifier des critiques abusives, et introduit de nouvelles informations dans notre système afin qu'il continue à devenir plus efficace pour détecter les abus ».
Cependant, comme l’a indiqué Tommy Noonan, fondateur du site Web ReviewMeta, Amazon fait des efforts pour combattre les marchands qui font la promotion de critiques factices sur sa plateforme, mais « leur façon de gérer les choses est réactive, et non proactive ».
Source: Newsweek
Et vous ?
Que pensez-vous de l’enquête de Which ??
Achetez-vous des articles sur Amazon ? Quels critères guident votre choix ?
Avez-vous encore confiance dans les avis sur Internet ?
Que pourrait faire Amazon pour mieux protéger le consommateur ?
Lire aussi
Amazon paiera 0 $ d'impôts fédéraux sur 11,2 Md$ de bénéfices en 2018 selon un rapport, et New-York proteste contre la construction de son siège
Amazon peut être tenu responsable des produits vendus par des tiers sur sa plateforme, d'après une décision rendue par une cour d'appel américaine
Amazon accusé de cautionner la vente d'articles contrefaits sur son site d'e-commerce, l'entreprise ne ferait pas assez pour arrêter cette pratique
Les fraudeurs achètent des milliers de faux commentaires Amazon notés 5 étoiles via Facebook, le système de notation d'Amazon est-il encore fiable ?
Les travailleurs d'Amazon écoutent ce que vous dites à Alexa, son assistant vocal intelligent, et en parlent dans un forum de discussion interne
Les vendeurs d'Amazon soudoient les acheteurs avec de l'argent comptant et des chèques-cadeaux
Pour des critiques 5 étoiles, selon une enquête
Les vendeurs d'Amazon soudoient les acheteurs avec de l'argent comptant et des chèques-cadeaux
Pour des critiques 5 étoiles, selon une enquête
Le , par Stan Adkens
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !